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Minute culturelle

 

Cela pourrait ressembler à un inventaire à la manière du grand Prévert. Il s'agirait de citer les noms de tous les poissons qui peuplent les côtes tunisiennes. A tout le moins faudrait-il nommer les espèces les plus courantes, celles que les plateaux de poissons exhibent dans les restaurants. L'exercice n'est pas aussi simple! En effet, les poissons portent en Tunisie plusieurs noms qui flottent entre au moins trois langues: l'arabe, le français et l'italien. Il devient dès lors complexe de maîtriser un lexique aussi frétillant et les meilleurs connaisseurs en donnent parfois leur langue au chat.

Sur un plateau de poissons, le bar côtoie le pageot, le rouget et la sole semblent engagés dans un dialogue muet, le denté et la daurade lancent des reflets gris. Parfois, une grosse pièce vole la vedette comme par exemple un mérou blanc, un sar royal ou un thon rouge. Au fil des saisons, les poissons changent, attirent les regards durant quelques semaines puis s'effacent jusqu'à l'année prochaine.

Evidemment, c'est au marché que le choix est le plus grand! Car les marchés aux poissons tunisiens sont à nul autres pareils. Riche de centaines d'espèces comme à Sfax, des sardines et des anchois à foison comme à Mahdia ou Kelibia, regorgeant d'espadons et de thons comme à Tunis, les marchés vivent au rythme du poisson. Parfois, comme à Djerba, la vente à la criée reste la règle. Souvent, sur les débarcadères, comme à Sidi Rais, des enchères improvisées prennent place au bord de la mer, avec de spectaculaires pesées sur des balances à fléau qu'on dirait tout droit sorties de l'Antiquité.

N'oublions pas les autres poissons: le serre, la bonite, le limon, la lotte et le turbot. N'oublions ni le poulpe ni la seiche et le calmar. Crabes, crevettes et langoustes ont tout autant nos faveurs. De la Goulette à Bizerte, de Gabès à Zarzis, entre marchés, grills et restaurants, plaçons nous résolument sous le signe du poisson et n'oublions pas que cet "enfant de la mer", comme le désigne le dialecte tunisien, est le plus recherché des symboles prophylactiques, le plus ardent des porte-bonheur.